Dans sa politique pour l’apaisement des passions religieuses dans le royaume de France, la reine mère Catherine de Médicis avait besoin de bien des atouts, en particulier des décisions prises par le concile Trente, où elle avait pour les dernières et décisives cessions envoyé son conseiller personnel Louis de Saint Gelais, seigneur de Lansac, comme ambassadeur de France. Sachant que les décisions qui allaient être annoncées avec la clôture du concile, étaient celles qu’elle en attendait (°1), elle fit revenir aussitôt que possible Saint Gelais, à qui elle avait donc confié la mission de faire entériner par le Parlement de Paris, les édits prononcés à Rouen.
Les principes édictés lors du Concile de Trente, qui avait débuté le 13 décembre 1545 en réponse aux demandes formulées par Martin Luther et Jean Calvin dans le cadre de la réforme protestante, auront permis quasiment jour pour jour 18 ans plus tard, le 4 décembre 1563, de rétablir l’autorité du pape, que la Réforme protestante avait ébranlée.
Le catholicisme va y puiser les moyens pour arrêter l’expansion du protestantisme en France, comme celui de la refouler partiellement dans l’Empire germanique, par les trois principaux outils qui y seront forgés: La promulgation du catéchisme romain, l’édition de la Vulgate, la traduction de la Bible en latin par Saint Jérôme, auquel il faudra aussi ajouter la réforme du bréviaire et du missel. Le concile avait enfin donné au catholicisme un dogme bien défini.
La reine mère, forte du soutien du pape Paul V, avait su se convaincre que les années 1560-1562 avaient été le pic de la diffusion de la religion réformée en France, et que ce moment de conversion massive, cet enthousiasme si inexplicable allait enfin se ralentir, ne laissant plus à la Religion nouvelle la possibilité de pouvoir s’imposer au France, comme elle avait pu l’imaginer un moment. Mais pour stabiliser cette situation et accélérer la décrue de la ‘religion prétendument réformée, il lui fallait œuvrer pour l’apaisement entre les religions catholique et protestante, et pour cela imposer l’autorité royale aux deux confessions.
Il lui fallait donc mettre en œuvre une autre action plus forte encore pour que l’apaisement, qui aurait du naturellement découler de l’édit de tolérance du 17 janvier 1562, entre dans le quotidien du royaume (°2): Ce sera ‘Le Tour de France’
Cette longue aventure, comme on va le voir nécessitait au préalable de pouvoir régler, avec l’extérieur et l’Angleterre, avant même les questions toujours ouvertes avec les Princes allemands et l’Espagne, la toujours brûlante question de Calais, et avec l’intérieur, la rivalité des trois camps nobiliaires du royaume, tous parents entre eux: Les Montmorency partagés entre catholiques et protestants par leurs neveux Coligny, les Guise exclusivement catholiques et proches de l’Espagne, les Bourbon, ces premiers princes du sang, ayant préséance sur les deux premiers, mais trop souvent changeant, et dont la branche cadette, celle des Condé, était devenue la tête du parti protestant. Cette rivalité était devenue ‘affaire d’état’ depuis l’assassinat du duc de Guise, attribué par les catholiques au protestant l’amiral de Coligny.
Aussi et une fois encore avant le départ projeté du ‘Tour de France’, Catherine sentant la reine Elisabeth dans un moment de conciliation, voudra revenir sur l’affaire de Calais, la terminer définitivement et obtenir la restitution des otages emprisonnés depuis 7 ans. Elle fera pour cela prévenir le 13 février Throckmorton enfermé à Saint Germain. Ce dernier arriva dès le 14 aux couvent des Bonshommes de Chaillot, où Catherine avait souhaité le voir ‘seule à seul’. Il n’avait pu bien sur obtenir aucune nouvelle instruction de sa maitresse la reine Elisabeth. L’entrevue commencera par ces mots de la reine mère:« Nous ne demandons rien que la liberté des quatre pauvres gentilshommes détenus par delà sans raison ». Le dialogue va ainsi se construire: Throckmorton, « La Reine (Elisabeth) verrait avec plaisir que lord Dudley (°3) vint en France pour ratifier la paix » à quoi la reine mère lui fit répondre: Qu’il emmène avec lui les otages et s’il en était ainsi, le roi lui remettra 100.000 couronnes et à vous 20.000. »
Thockmorton avec sa brutalité et son manque de diplomatie habituels, va alors et sans nuances s’en tenir à répéter strictement : « Que le Roi paye les 500.000 écus inscrits dans le traité de Cateau -Cambresis… !! »
C’en était fini, Trockmorton était congédié sans un mot de plus, mais la reine mère dans sa volonté de construire la paix, le fit quand même appeler une seconde fois et lui offrit alors spontanément 120.000 couronnes. « Mais la reine ne veut pas d’argent, répondit Trockmorton, elle ne demande que la ratification du traité de Cateau-Cambrésis, la restitution de Calais ». A nouveau Trockmorton allait trop loin. Le 15, il fut sans autres égards, ramené à sa prison de Saint-Germain-en- Laye, où des ordres furent donnés pour qu’il soit gardé sévèrement.
Charles, Cardinal de Guise Lord Dudley, 1532-1588
puis Cardinal de Lorraine 1524-1574 Le grand favori de la reine Elisabeth
Catherine de Médicis toujours obsédée par l’intérêt de la France, ne restera pas sur ce qu’elle considérait comme un échec, et avec son habileté toute florentine, elle va relancer l’affaire de Calais par l’intermédiaire du Cardinal de Lorraine. Ce dernier le 19 février 1564, sur instruction de la reine mère, va jouer une petite comédie à Throckmorton, en lui montrant par une subtile indiscrétion de La Salle, qui lui faisait ce jour là office de secrétaire, une note secrète de Catherine de Médicis. Trockmorton, qui savait qu’il avait été trop raide, va cette fois faire montre de diplomatie et répondra au Cardinal de Lorraine qu’il lui parle non pas en qualité d’ambassadeur mais seulement à titre personnel: Il pense que « la Reine ma maitresse serait assez disposée à accepter l’arbitrage du roi d’Espagne ». Sur quoi La Salle, l’émissaire de Catherine de Médicis qui accompagnait le Cardinal de Lorraine lui dit : « La reine verrait avec plaisir que Lord Dudley vint en France pour ratifier la paix, et qu’il amenât avec lui les otages. S’il en était ainsi le roi lui remettrait 100.000 couronnes et à vous 20.000 »…. Trockmorton, revenu à nouveau dans sa prison, aussitôt adressera aussitôt à Lord Dudley le compte rendu (°4) fidèle de ses entretiens avec la reine mère. Ainsi Catherine de Médicis pensait avoir relancé le débat sur Calais, et n’avait plus à attendre cette fois, comment Elisabeth voudrait préférer la paix à l’état d’hostilité permanente, et initierai une reprise des négociations pour les rendre définitive.
Pour les autres actions diplomatiques, les rendez vous avaient été demandés avec les Princes allemands et avec le roi Philipe II d’Espagne. Elle attendait de cette entrevue espagnole, le bonheur de revoir sa fille qu’elle n’avait plus revue depuis son mariage par procuration à Notre Dame de Paris le 22 juin 1559.
Il restait ensuite à la reine mère de régler la question brulante posée avec insistance par les Guise qui avaient saisi le Parlement de Paris pour faire mettre en jugement et condamner l’amiral de Coligny. Elle eut alors l’habileté de faire résoudre ce problème par son fils, qui retirant l’affaire des mains du Parlement de Paris, la porta au Grand Conseil, qui s’exprimera alors en exigeant que le parlement diffère de trois ans le procès introduit par les Guise « défendant à l’une ou l‘autre partie de n’attenter, ni entreprendre l’une contre l’autre, par voie de fait ». L’ordre royal précédant la déclaration de sa mère en février 1564 que Coligny (°5) serait déclaré « purgé, déchargé et innocent »
Le Tour de France avait été une stratégie et une décision de la seule reine mère qu’elle avait prise et imposée à son entourage dans la fin de l’année 1563. Il s’agissait de présenter le jeune roi Charles IX entouré de son frère Alexandre Edouard, duc d’Orléans, et de sa sœur la princesse Marguerite, et de la famille royale avec les principaux princes du sang, à toute la France, celle de provinces, celle des villes comme celle des campagnes, la France des catholiques comme celle des protestants, en partie apaisés pour certains de ces derniers, depuis l’édit d’Amboise grâce à l’amnistie générale et irrévocable qui y était attachée. Ce sera, ce grand projet appelé le ‘Grand Tour de France’, une aventure qui replongeait bien des siècles plus tard, dans le nomadisme des rois mérovingiens, mais avec une durée encore plus grande, une durée que jamais la France n’avait jusqu’alors jamais connu.
Ce ‘Tour de France’ lui fera affronter les situations les plus diverses pouvant même se montrer réellement dangereuse: L’itinéraire passera par les villes parmi les plus agitées du royaume, ou l’inverse les plus apaisées: Toulouse, Narbonne ou Carcassonne s’étaient quant à elles totalement débarrassées de leurs protestants, firent une ovation au jeune roi et à la Reine Mère, à l’opposé dans des villes devenues ou restées protestantes, le Tour de France se verra accueilli plus que timidement, parfois même avec le respect le plus minimum que l’on ne devra qu’au roi, parce ce qu’il représente. Il y aura même des situations extrêmes comme à Montauban le 20 mars 1565, où avant de pouvoir y entrer, il faudra négocier avec les consuls le désarmement de la ville, particulièrement hostile, n’ayant pas oublié qu’elle avait dû résister dans le sang aux violences des trois sièges de l’ultra-catholique Montluc. Indépendamment de cela, à l’arrivée dans chaque ville, la reine mère fera siéger son conseil privé, dans l’espoir que les trois factions nourrissant la division du royaume, les Bourbons, les Guise et les Montmorency, viennent à tempérer leur relation, par l’habitude de se connaitre mieux
Revenons à ce petit matin du 13 mars et au départ depuis Fontainebleau, où les fêtes s’étaient succédées sans interruption depuis le 31 janvier faisant que Fontainebleau sera le départ réel de ce ‘Grand Tour de France’ débuté officiellement à Paris le 24 janvier.
Il faut imaginer ce qu’avait pu être la mise en route de ce convoi extraordinaire qui regroupait plus de 15.000 personnes, avec leurs carrosses, leurs litières, leurs chariots, les artisans, les marchands, les boutiques et tout un personnel innombrable, le tout formant une véritable ville en marche, et pas n’importe quelle ville, on aurait pu alors dire la première ville de France, sa capitale devenue ambulante, c'est-à-dire l’état. On peut même imaginer que la tête du convoi était arrivée à Moret ce lundi 13 mars où, selon Albert Jouan (°6) le témoin oculaire ayant décrit au jour le jour cette aventure que sera la ‘Tour de France’, explique qu’il ne fera qu’y passer sans s’arrêter, alors même que la queue du convoi ne commençait qu’à s’ébranler depuis Fontainebleau. Le long convoi va donc traverser Moret pour se rendre et coucher à Montereau-Fault-Yonne. La ville royale de Moret avait dressé des arcs de triomphe en l’honneur du passage royal.
On peut imaginer ce qu’aura du être traversée de la ville alors peuplée d’à peine 2000 habitants, solidement murée avec ses huit portes aux passages étroits, entre deux desquelles passait la ‘Grande rue’ où se déroulera interminablement les kilomètres du cortège royal , entrant par la porte de Paris et sortant par celle de Bourgogne qui protégeait le vieux pont pavé permettant le franchissement du Loing, appelé alors le pont de César, d’où l’on pouvait apercevoir en surplomb le fier donjon de l’ancienne forteresse médiévale. L’accueil par l’échevin, par le Doyen avec ses prêtres et ses vicaires, et toutes les notabilités pour qui ce jour était un jour historique, résumera la joie des morétains, mais ils ne purent que saluer, le temps ne leur étant pas offert pour présenter leurs hommages et rendre les honneurs.
En tête de ce convoi, la Maison du roi, commandée par le Grand Ecuyer de France, Claude Gouffier, suivie de celle de la reine mère. Charles IX (°7) entouré de ses gentilshommes, est à la tête d’un régiment fort de 10 compagnies de gens à pied, commandé par le Colonel Philippe Strozzi le fils de Pierre Strozzi fait maréchal de France par Catherine de Médicis. Ce régiment est suivi de quatre compagnies d’hommes d’armes et d’une de chevau-légers, le tout étant destiné à bien montrer l’idée de force de cet appareil militaire et la grandeur du roi. Bien sur ces troupes étaient là aussi pour veiller à sa sécurité, en imposant « la paix du roi » aussi bien aux catholiques qu’aux huguenots. Le plus souvent le Connétable de Montmorency, alors âgé de 72 ans, est près de lui avec l’épée de sa fonction, ayant laissé sa femme Louise de Savoie, elle aussi fort âgée, voyager aux cotés de la reine mère.
La Reine mère, était à la suite de son fils dans le convoi. Très bonne cavalière, elle alternait le cheval - elle disposait des six montures haquenées - avec le coche tiré par six chevaux de trait; suivaient avec sa maison, deux de ses enfants Alexandre Edouard, le futur Henri III deux ans plus jeune que son aîné et Marguerite la future épouse d’Henri de Navarre, entourés de leur maison (Le petit-dernier François était resté à Saint Germain). La princesse de la Roche-sur-Yon qui avait la lourde responsabilité de surveiller ‘ l’Escadron volant’ (°8) de la reine mère c'est-à-dire ses quatre-vingt filles d’honneur, fermait sa suite, avec la mission de veiller que ce temps de carême où se tenait alors le Tour de France respecterait bien toutes ses règles de maigre, de jeûne et de comportement.
Claude Gouffier 1510-1570 Philippe Strozzi, 1541-1582
Grand écuyer de France Colonel général de l’infanterie Française
Si le roi entre le plus souvent en premier dans chacune des villes qui seront visitées, il y allait de l’honneur et de l’importance qu’on entendait montrer, la reine mère entrait à sa suite ou séparément, comme cela ses produira à Troyes. Le roi est entouré de la force armée et des principaux officiers de la Couronne, mais c’est près de sa mère que voyagent le Conseil du Roi, les secrétaires d’état et les ambassadeurs des pays invités, et ici particulièrement les ambassadeurs d’Angleterre Smith (°9), d’Espagne Don Françès de Alava (°10) et l’envoyé du doge vénitien Marc Antoine Barbaro. Etait aussi près de la reine mère, son chancelier Michel de l’Hôpital avec son épouse, qui comme lui avait embrassé la Réforme et avec la même modération.
De Montereau où le château planté sur la pointe entre Seine et Yonne, avait accueilli la famille royale pour la nuit, le convoi s’ébranlera le 14 pour s’arrêter à Pont-sur-Yonne, où ayant traversé la rivière sur un pont de bois, il va gagner Sens, la ville du mariage de Saint Louis et de Marguerite de Provence, Sens la ville très catholique sous la tutelle du Cardinal de Guise, et de là arriver à Troyes la ‘ grande ville’ qui allait donner une entrée solennelle au roi et à la reine mère, mais où surtout les rendez-vous avaient été organisés soigneusement avec l’Angleterre pour poursuivre les négociations sur le sort de Calais
La Cathédrale de Sens
Ce sera le samedi 18 mars 1564, que le jeune roi somptueusement vêtu de drap bleu et argent, ‘sa toque surmontée d’une longue plume blanche’, monté sur Gonnor son cheval blanc, va faire son entrée à Troyes, la capitale de la province de Champagne, vieille terre catholique gouvernée alors par le jeune duc de Guise. A ses côtés, son frère, Henri duc d’Orléans, dans une robe de drap d’or conduit par les ducs d’Aumale et de Guise, le jeune prince de Navarre, le cardinal de Bourbon, le Prince de Condé, M. d’Andelot, le duc de Montpensier, le Prince de La Roche-sur-Yon son frère, le duc de Nevers, qui étaient suivis des troupes françaises et Ecossaises, ces dernières armées de courtes piques. Le roi se casernera à l’Evêché. La milice bourgeoise conduite par les capitaines des quatre quartiers de la ville, leur rendra les honneurs.
L’ancien évêché de Troyes Cathédrale Saint Pierre et Saint Paul
En cette période de carême, il fallait montrer aux habitants que le roi était le roi mais avant tout un jeune monarque bon catholique. Aussi le dimanche des Rameaux, Charles IX va aller toucher dans la cathédrale Saint Pierre et Saint Paul les écrouelles de deux cents malades scrofuleux puis, le Jeudi-Saint lors de la célébration de la Cène à l’Evêché, il lavera les pieds de treize enfants pauvres. La reine mère et sa suite étaient entrés après lui, mais cette entrée à Troyes portait une toute autre signification
Jean de Morvilliers 1506-1577 Jacques Bourdin 1506-1567
Il s‘agissait pour elle, dans ce moment de fortes tensions en Europe, de trouver une solution à la querelle anglaise, focalisée autour de l’affaire de Calais, pour laquelle elle s’était méticuleusement préparée, en confiant à l’évêque d’Orléans Jean de Morvilliers et à Jacques Bourdin son secrétaire d’état, le soin de l’organisation, de la stratégie et de la tactique des négociations Pour commencer, le choix de la ville de Troyes pour négocier avec l’Angleterre de la souveraineté française alors basée sur Calais et le Calaisis, n’était pas neutre. Il s’agissait de rappeler à l’inconscient anglais symboliquement, que c’était à Troyes le 21 mai 1420 dans cette même cathédrale Saint Pierre et Saint Paul que l’honteux traité avec l’Angleterre d’Henri V marquant l'apogée de la suprématie anglaise lors de la guerre de Cent Ans. Les négociateurs de la reine mère ne manqueront pas de le rappeler à leurs homologues anglais, dès leur arrivée.
France Somer que Smith (°11) et Trockmorton avait envoyé en Angleterre pour connaitre les dernières instructions de la reine Elisabeth les avait rejoint à Troyes le 31 mars. Les discussions pouvaient alors commencer. La première rencontre entre les envoyés anglais et les négociateurs français eut lieu dans l’après-midi du 2 avril et déjà le premier obstacle va apparaitre: Ce sera la somme à payer pour la libération des otages. Les échanges feutrés ou rudes, entre les négociateurs français et anglais, ou entre le seul ambassadeur Smith et la Reine mère, Trockmorton ayant à nouveau montré ses excès, vont durer jusqu’à ce que la reine mère se voit dans l’obligation de poser un ultimatum aux anglais ; et elle fera bien car finalement le 11 avril l’accord entre la France et l’Angleterre sera trouvé et aussitôt signé, avec sa clause majeure que cette dernière renonce à toute prétention territoriale sur le continent. Catherine de Médicis, après l’affaire du Havre et les preuves écrites des arrangements entre l’Angleterre et les protestants français, aurait pu avoir une position beaucoup plus raide. Mais, la peur de l’Espagne qu’elle allait bientôt rencontrer, avait commandé à Catherine de ménager l’Angleterre. Aussi, le traité de Cateau - Cambrésis n’avait été ni confirmé, ni annulé, et surtout et c’est ce qui importait aux anglais, la liberté du commerce franco-anglais était rétablie, avec pour l’orgueil anglais un petit plus: La rançon des otages payées 120.000 écus au comptant. Ainsi, ces 4 malheureux, dont le nom même avait fini par être oublié, Palaiseau, de Mouy, de Nantouillet, prévôt de Paris et de la Ferté allaient enfin pouvoir être libérés
Elisabeth 1ère vers 1564 Catherine de Médicis
La paix avec l’Angleterre, une paix « sans préjudicier aux droits & prétentions des deux parties », est proclamée à Paris le 23 avril 1564, le Parlement en ayant reçu la nouvelle par la lettre de Catherine de Médicis écrite le jour même du 11 avril 1564. Le Tour de France, première mission accomplie, pouvait quitter Troyes le 16 avril, où il était resté 24 jours, et la Reine mère la première ne pouvait pas imaginer dans sa joie et son contentement au soir du 11 avril 1564, que quasiment 3 ans plus tard, il lui faudrait se déplacer à nouveau avec le Roi, les officiers de la Couronne et le Parlement cette fois dans la ville de Moret, pour rendre définitive la volonté royale et le traité convenu ce jour là avec l’Angleterre.
Toutefois, avant la signature du traité de paix, il se passera une étrange scène entre les 3 envoyés anglais: Smith, Throckmorton et Somers sur instruction de la reine Elisabeth avaient fixé à 200.000 Couronnes la mise en liberté des otages, détenus à Londres, pour la garantie du traité de Cateau-Cambrésis. De son côté Catherine avait déclaré à Smith que, la reprise du Havre-de-Grace lui ayant couté un million, elle n’entendait donner que 120.000 couronnes. C’était à prendre ou à laisser et si on n’acceptait pas son offre, elle partirait de Troyes le lendemain. Tout serait alors rompu. Les ‘ Calendar of State papers France, 1564 – Record Office’ rendent compte de ce qui va se passer en expliquant comment se fixèrent les débats:
« L’embarras de Smith et de Trockmorton était extrême, lorsque Somer leur vint en aide en exhibant un pli cacheté qui renfermait les dernières instructions de la reine Elisabeth. Ils y trouvèrent un pouvoir qui leur permettait de faire au dernier moment cette humiliante concession. En entendant cette lecture Trockmorton fut pris de colère, il reprocha à Smith d’avoir révélé à Catherine le secret de cette missive; il le traita de traitre, de coquin et le menaça de son poignard qu’il avait tiré. Sans France Somers qui se jeta entre eux, on en serait venu aux coups. On notera simplement que l’intraitable Trockmorton dont Catherine de Médicis ayant compris tout le mal qu’il avait fait à la France, voulait l’éloignement définitif du royaume, sinon l’enfermement dans le royaume, fera l’objet de toute la subtilité florentine de la reine mère, lorsqu’il s’agissait de l’intérêt du royaume : Il recevra un collier d’une valeur de 20.000 écus et sera ensuite appelé par Catherine de Médicis « l’ambassadeur de la paix » et elle le recommandera même à l’amitié parisienne, en écrivant au maréchal de Montmorency. « Le sieur de Trockmorton s’en allant à Paris, qui a été l’un des principaux ministres de la paix, je désire, comme il est bien raisonnable, qu’il soit honnêtement traité et caressé, et à cette cause je vous prie l’aller visiter et dire au prévôt des marchands et échevins de la ville qu’ils lui fassent présents et autres honnêteté qu’on a accoutumé de faire à personnes que l’on veut caresser….. » Mais après ce dernier épisode, La France n’entendra plus jamais parler de celui qui lui aura été si longtemps si néfaste !
La peur de l’Espagne, qu’elle allait bientôt rencontrer, avait commandé à Catherine de ménager l’Angleterre. Dans les termes du traité de Troyes, le traité de Cateau-Cambrésis auquel il aurait du se référer, n’avait été ni confirmé, ni annulé, toutefois et ce qui semblait important pour les négociateurs anglais avait été précisé: La liberté du commerce franco-anglais qui était rétablie, et en plus de la rançon des otages payées 120.000 écus soleil au comptant.
La paix proclamée à Paris sera suivie le 27 octobre de la paix proclamée et ratifiée à Windsor par la reine Elisabeth (°12) par un serment solennel qu’elle fera en présence des ambassadeurs français.. Ce traité de Troyes avait mis fin à cette guerre toute théorique déclarée par la reine mère à Rouen, un an plus tôt, et restauré l’honneur français tant sali 144 ans plus tôt
Charles III de Lorraine 1543-1608 Armoiries ducales Claude de France
Duchesse de Lorraine 1547-1575
Le Tour de France (°13) se continuait en direction de la Lorraine, second acte diplomatique voulu par la reine mère, et s’arrêtera à Bar-le-Duc la frontière en Lorraine du royaume de France, quittant pour cela de manière toute symbolique le sol du royaume pour se fixer sur les terres ducales de Charles III. Charles III, élevé à la cour de France avait épousé en 1559 Claude de France, 2ème fille d’Henri II et de Catherine de Médicis alors âgée de 11 ans.
L’occasion de cette mesure tout à fait exceptionnelle était le baptême (°14) de son premier petit fils Henri, le futur duc de Lorraine, prévu pour le 7 mai 1564. Ce dernier devait avoir comme parrain le roi Charles IX son oncle et le comte Charles de Mansfeld le futur seigneur de Noyon-sur-Andelle et gentilhomme de la chambre du roi, avant que de devenir après Catherine de Médicis, le premier comte de Moret
Deux jours après le baptême un grand tournoi eut lieu, et les fêtes se poursuivirent jusqu’au 9 mai, où le convoi royal prit la route de la Bourgogne. A Dijon où il entra le 22 mai à Dijon où un grand scandale va éclater, un terrible scandale qui aurait pu être le premier accroc dans la volonté de pacification de la reine mère entre les catholiques et les protestants: L’une des filles d’honneur de la Reine, et non des moindres, Isabelle de Limeuil (°15), que Catherine avait chargé de séduire le trop volage Prince de Condé, avait été engrossée par le prince de Condé, sans que la reine en soit informée, où elle va donner le jour dans cette ville à un fils, en nommant à haute voix qui était son père, celui qui était de plus le chef du parti protestant.
Devant ce scandale la Reine la fit chasser sur le champ de sa suite, en la faisant enfermer dans un couvent à Auxonne. Dans le même temps Elisabeth de Roye l’épouse du Prince de Condé très gravement malade, elle allait mourir quelques semaines plus tard, avait fait que le prince de Condé avait quitté la Cour à Bar-le-Duc pour la retrouver dans leur château de Condé - en -Brie donnant à cette affaire une affreuse sonorité.
Dans le même temps la mort de Calvin à Genève le 27 mai, qui laissait le protestantisme français aux mains du seul Théodore de Bèze, déjà le conseiller particulier du Prince de Condé, n’interpella personne ni la cour ni le convoi du Tour de France, et la reine mère n’en citera même pas un seul mot.
Poursuivant sa route le ‘Tour de France s’arrêtera à Lyon alors la plus florentine des villes française, où un édit interdira le culte protestant dans la ville. Ce sera un séjour long de près d’un mois, d’où il gagnera le Dauphiné, traversant ou dormant dans de nombreuses villes, et s’étant arrêté au château de Roussillon (°16), il va y séjourner là aussi un mois.
C’est là que le roi y signera le fameux édit du 9 août dit « l’édit de Roussillon », fixant le début de l’année au 1er janvier au lieu du jour de Pâques qui avait jusqu’alors, l’inconvénient de s‘adosser à un jour qui n’était pas un jour fixe, puis ce sera la route vers le Comtat Venaissin et la Provence, la fameuse traversée du Rhône à Tarascon en plein hiver, où sous un vent violent, le convoi et ses lourds chariots franchirent le fleuve gelé pris par des glaces de plus d’un mètre d’épaisseur, pour entrer en Languedoc par la petite ville de Beaucaire le 11 décembre. Le Roi et la reine - mère vont rester dans cette province, alors la plus gagnée de France à la Réforme, 100 jours en parvenant le 31 janvier à Toulouse, où ils séjourneront jusqu’au 19 mars. Toulouse c’était la capitale de la province ‘rebelle’ dont Damville, le second fils du connétable de Montmorency était le gouverneur depuis le mois de mai précédent.
Pendant son long séjour à Toulouse, deux évènements concerneront la famille royale : le roi fait sa confirmation avec son frère Alexandre Edouard, le futur Henri III, ainsi baptisé du nom de ses deux parrains le cardinal Alexandre Farnèse et le jeune roi d’Angleterre Edouard VI, qui prendra de ce jour le nom d'Henri. Ce sacrement de confirmation de l’église catholique consistait à oindre d'huile sainte une personne baptisée afin qu'elle reçoive le don du Saint-Esprit. Mais surtout la reine mère recevra le 2 février la lettre tant attendue du roi d’Espagne son gendre Philippe II, qui consentait à la rencontrer en territoire français à Bayonne.
Philippe II d’Espagne Catherine de Médicis en amazone
Cette réunion était essentielle car c’est par le soutien du seul roi d’Espagne que les querelles religieuses, du moins celles qui relevait du parti catholique, pouvaient s’apaiser. Ensuite, l’Espagne, par sa puissance financière et territoriale, c’était aussi le jeu complexe de la paix des royaumes au de là de la religion sa principale composante, et cette opportunité que les souverains se rencontrent directement, c’était l’opportunité pour Catherine de Médicis de fixer, après l’accord anglais, la paix définitive ou non pour son royaume. Car avec la puissante et orgueilleuse Espagne le risque était et restait toujours la guerre.
Mais ce ne sera qu’à la fin mai ou début juin que la réunion de Bayonne avec le roi d’Espagne pourra se tenir, et le temps semblera bien long à la reine mère pour revoir sa fille aînée Elisabeth celle qu’elle avait laissé partir si jeune, âgée de 14 ans au lendemain de son mariage par procuration avec Philippe d’Espagne représenté alors par le duc d’Albe, et qui en avait aujourd’hui à peine 19. Et pour la première fois, lors de ce long Tour de France, la reine mère précédera le roi et son frère Henri qu’elle laissera à Dax, et se rendra la première directement à Bayonne, en s’y rendant secrètement et sous un déguisement pour y coucher la nuit du 30 mai 1565, pour être sure que tout serait bien prêt pour la recevoir
Son fils, le roi Charles IX avait préféré s’embarquer depuis Dax et naviguer sur l’Adour jusqu’à Bayonne, où elle cette rivière rejoint la Nive, où il arriva dans la journée du dimanche 3 juin. Descendu de son bateau, le jeune roi enfourche un cheval et fait son entrée par la porte du Saint Esprit qui a été ornée en son honneur de manière solennelle. Son frère Henri quand à lui ne partira que le samedi suivant pour aller au devant de sa sœur la reine d’Espagne, qu’il retrouvera à Hernani d’où ils allèrent ensemble coucher à Saint Sébastien et de là Irun. Les deux rives de la Bidassoa séparaient encore, la reine d’Espagne et son jeune frère Henri de sa mère et du roi de France.
Une seule personne était mortellement inquiète de ce qui était à gérer pour l’accueil de son roi: c’était l’ambassadeur de Philippe II auprès du roi de France Don Françès Alava de Toledo, car dans le même temps où les souverains s’apprêtaient à se voir, deux évènements venaient de survenir qui mettait en cause la souveraineté et le pré carré du roi de France face à son maitre le roi d’Espagne, particulièrement susceptible dès qu’il s’agissait de la religion catholique (°17) :
Le grand Satan, c’est à dire le turc mahométan, avait envoyé des navires depuis Alger en direction des rivages de Provence, pour y porter à terre un turc envoyé en ambassadeur pour rencontrer le roi de France. Cet ambassadeur turc (°18), quand il eut appris que le roi n’était plus en Provence, se décidera aussitôt de se rendre à Bayonne, et il venait d’arriver à quatre lieux de la ville. Il avait fait savoir que le roi de France ne pouvait pas ne pas le recevoir, puisqu’il avait été reçu par l’empereur d’Allemagne, c’est à dire le propre frère du père de Philippe II
L’autre incident, c’était la nouvelle qu’une nouvelle flotte, sur les ordres de l’amiral de Coligny, comprenant 4 navires bien armés, venait de partir de Normandie vers la Floride (Rio de Janeiro et la baie de Guanabare) (°19), alors que d’autres navires français étaient chargés de surveiller ( pour ne pas dire pirater) les navires espagnols à leur retour des Indes. Cela avait causé l’envoi d’une lettre de Philippe II à son ambassadeur, en date du 2 juin et de l’Escurial, le chargeant expressément de dire à la reine mère: « Vous direz à la reine que je suis au courant qu’à Dieppe on a armé des navires, qu’on a mis 500 soldats avec des munitions prêts à partir pour la Floride, que tout cela est fait par son ordre à elle. Je voudrais bien savoir, d’elle-même les raisons d’un tel acte si contraire à l’amitié et aux articles du traité qui existe entre nos deux pays. Si nous, les Espagnols, avons jusqu’à présent feint d’ignorer ces préparatifs, c’est parce que nous croyons qu’il s’agissait de corsaires ordinaires, ne recevant pas d’ordres. Si vraiment ces navires partent pour la Floride, cette expédition est contraire à notre amitié. Tout cela vous lui direz, si les navires ne sont pas encore partis. Dans le cas contraire, ne lui en parlez pas. Car le duc d’Albe qui accompagne la Reine ma femme, recevra toutes les instructions nécessaires. »
Philippe II, Roi d’Espagne, 1527-1598 Elisabeth de France, reine d’Espagne 1545-1568
Dit autrement, cela voulait dire que le roi Philippe II, en raison de ces deux incidents, ou en simplement les utilisant comme prétexte, ne rencontrerait plus la reine mère, sa belle-mère ni le jeune roi, contrairement à son invitation reçue par cette dernière à Toulouse. Il indiqua à Saint Sulpice l’ambassadeur de France, que ce serait le duc d’Albe, l’orgueilleux castillan, qui accompagnerait la reine Elisabeth sa femme, et à ce dernier Philippe II dans toute son intransigeance il sera instruit de s’en tenir au concile de Trente et s’il le fallait au traité de Cateau- Cambrésis
Tout était tourné par la joie pour la reine mère de retrouver sa fille pour le roi, son frère Henri et sa sœur Marguerite d’aller accueillir une sœur tendrement aimée. Quittant le 10 juin, jour de la pentecôte Bayonne pour Saint Jean-de-Luz et de là le 14 pour Hendaye à la frontière du royaume.
Lorsqu’Elisabeth arrive sur les bords de la Bidassoa le 14 juin, elle est saluée par des décharges de mousqueteries françaises ordonnées par Strozzi. Sa mère ne peut attendre et traverse le fleuve, alors que son frère Charles lui, attend sur la rive française.
Et le 15 juin au soir la Reine d’Espagne entourée se sa mère et de son frère fait son entrée à Bayonne où elle se rend d’abord à la Cathédrale. La reine d’Espagne est suivie du duc d’Albe, porteur de la ‘Toison d’Or’ qu’il doit remettre de la part de Philippe II
Pour le duc d’Albe l’entrevue de Bayonne était aussi importante que pour la reine mère, et sachant par son ambassadeur Alava de Toledo, qu’il état plus simple de connaitre le vrai des choses par le jeune roi que par l’expérimentée florentine, c’est à lui qu’il va s’adresser en tout premier , pour comprendre quels pouvaient être les intentions de la France. Cela lui sera très facile car Charles lui récitera aussitôt : « Prendre les armes, il ne faut pas y songer ; je n’ai pas envie de ruiner mon royaume, ainsi qu’on avait commencé de le faire dans les luttes précédentes ». Et avant que de rencontrer la reine mère le duc d’Albe aura vu tout ce qu’il était important de voir et d’entendre, du cardinal de Bourbon au vaillant et vaniteux Montluc.
Elisabeth de France, reine d’Edpagne Ferdinand Alvarez de Toledo, duc d’Albe
1545-1568 1507-1582
Si Catherine de Médicis et la fratrie de ses enfants réunie à Bayonne, à l’exception du petit dernier François vivaient le bonheur de leurs retrouvailles, qui seraient hélas les dernières, la reine mère, trop habile pour ne pas tout voir sinon pressentir, ne pouvait se laisser aller à une certaine mélancolie. Sa fille première tant aimée, née française, lorsqu’elle lui dira : « Ma fille, vous êtes devenue bien espagnole ! » ne pourra que lui répondre et non sans finesse ni générosité : «Je suis espagnole, c’est mon devoir, mais je suis toujours votre fille, restée telle que lorsque vous m’envoyâtes en Espagne. »
En effet, le Duc d’Albe avait engagé seul les négociations avec la reine mère, disons plus tôt les conversations, car selon ses instructions, il n’y avait rien à négocier. Il y avait un premier et seul sujet, le catholicisme en France, et comment extirper l’hérésie de la religion dite nouvelle dans ce pays. Le professionnalisme de la reine mère, habile débatteur, qui lui fera vite comprendre qu’il n’arrivera à rien tout seul, aussi appellera t’il en renfort la Reine Elisabeth et puis voyant que cela ne changeait guère le résultat, la laissant seule face à sa mère, en espérant que les relations mère-fille permettrait de trouver, enfin une solution.
Mais il n’y aura pas de solution le 6 juillet 1565, la reine mère ne voulant pas que quiconque se mêle de la souveraineté dans son royaume, et que l’affaire des protestants en France, qu’elle tentait par ailleurs de réduire, était son affaire, sa seule affaire, et ce n’était pas au roi d’Espagne de lui dicter si une guerre devait être faire contre les protestants… !!!
En conclusion, La reine mère écrira une lettre à son gendre : « La reine votre femme pourra vous dire plus amplement ce qui a été arrêté ; elle pourra assurer de la volonté et zèle que avons à notre religion et envie de voir toutes choses au contentement du Service de Dieu, chose que n’oublierons et mettrons peine à si bien exécuter qu’il en aura le contentement et nous le bien que nous désirons… »
La reine mère s’était attendue à ce que les discussions aboutissent à l’affirmation d’une paix durable et sincère, le roi d’Espagne, à ca que la reine mère réduise une fois pour toute l’hérésie dans son royaume. Il n’en sera rien. Mais ce qui aurait pu passer pour un échec de Catherine de Médicis ne sera qu’un échec très partiel, face à un roi qui n’aurait jamais bougé sur les questions de la religion, mais qui par ailleurs avait bien accepté sans en tirer le moindre parti que la Reine mère ait su trouver un accord définitif avec l’Angleterre et les rinces allemands protestants
Château de Montceaux Château de Saint Maur
Entré dans sa capitale le 1er mai 1566, le roi a été absent de Paris pendant deux ans trois mois et 6 jours, après avoir parcouru 902 lieues.
Ce tour de France voulu et géré par la reine mère avait été, à la seule exception de Bayonne, un total succès, montant là encore les talents de chef d’état de Catherine de Médicis. Le Roi et la royauté catholique s’était imposés quasi unanimement, les affaires extérieures avaient été réglées dans le sens voulu par la France, avec bien sur la question de Calais, et des otages français, réglée une fois pour toute.
La reine mère pouvait elle imaginer une seule seconde, en prenant un repos bien mérité dans sa si belle maison de Montceaux qu’un an plus tard l’affaire de Calais allait revenir sur le devant de la scène, et qu’il faudrait alors l’épisode de Moret, pour que l’affaire de Calais soit définitivement réglée.
NOTES de la 4éme Partie
Note 1: Le concile avait été réuni pour entre autre amener la paix religieuse eu Europe. Malheureusement l’attitude maximaliste de l’Espagne, fera que les représentants des Principautés et de l’Empire allemand quitteront le concile, fermant ainsi tout rapprochement possible entre les catholiques et les réformés
Note 2: La France au XVIème siècle est un royaume, pas encore une nation !
Note 3: Robert Dudley, 1532-1588, 1er comte de Leicester, fils de John Dudley, sera le favori de la reine Élisabeth Ire d'Angleterre, et aura beaucoup d’influence sur elle.
Note 4: Calendar of state papers, France 1564, pages.63 et suivantes
Note 5: L’amiral de Coligny sera définitivement innocenté de l’accusation portée contre lui, l’amiral ayant déclaré formellement « n’avoir fait, ni fait faire, ni approuvé cet homicide » par l’arrêt du roi du 29 janvier 1566, qui reprend les diverses accusations de la duchesse de Guise. Le premier acte de l’assemblée des notables de février 1565 sera un acte de réconciliation déclarant l’Amiral de Coligny innocent de toute complicité dans l’assassinat du duc de Guise. Ce qui montre, si c’était encore nécessaire, le succès de la politique de la reine mère, c’est que cette ordonnance de Moulin de Michel de l’Hôpital comme cet acte de réconciliation seront signés par le roi la reine mère, le duc d’Anjou et tous les membres du conseil, l’intégralité des membres des maisons réconciliées, du cardinal de Bourbon, du prince de Condé, du duc de Montpensier, des cardinaux de Lorraine et de Guise, des ducs de Longueville, de Nemours, de Nevers, du cardinal de Chatillon (réformé et marié), du connétable de Montmorency, du chancelier Michel de l’Hôpital, des maréchaux de France Vieilleville, Bourdillon, Damville qui venait d’être fait maréchal quelques jours plus tôt, et enfin du sieur de Chatillon, amiral de France. La Reine mère avait non seulement obtenu mais fait acter la réconciliation ente les trois camps qui s’étaient affrontés jusqu’à ce jour.
Note 6: Abel Jouan – ‘Recueil et discours du voyage du roy Charles IX faict et recueilly par Abel Jouan’. 1566.
Plusieurs relations notent cependant que Charles IX se serait bien arrêté pour dîner à Moret
Note 7: Charles IX montait son premier cheval, son cheval d’amble, dressé par la ‘ Grande Ecurie’ Gonnor. il avait un second cheval appelé Le Nain et plusieurs autres, toute une écurie…
Note 8 : La reine mère n'a pas dédaigné la collaboration de dames de sa maison pour accélérer ou parfaire ses négociations politiques. Mais Catherine de Médicis leur imposera un contrôle rigoureux. Rencontres et maintien sont soumis à des règles précises. Nul gentilhomme ne peut parler avec les filles de la reine en dehors de la présence de celle-ci ou de la première dame d'honneur, la princesse de la Roche-sur-Yon. Assises sur une chaise, elles peuvent, sans choquer la décence, inviter leurs compagnons à s'asseoir à leurs côtés. Assises au sol, elles acceptent qu'ils posent un genou à terre. Mais s'allonger auprès d'elles, comme cela était naguère de mode sous François Ier , est réprouvé. »
Brantôme décrivait ainsi l’Escadron de la Reine mère dans le Discours merveilleux de la vie, actions et déportements de Catherine de Médicis, ouvrage de propagande protestante: « Sa compagnie et sa court était un vrai Paradis du monde et école de toute honnêteté de vertu, l’ornement de la France, ainsi que le savaient bien dire les étrangers quand ils venaient, car ils étaient très bien reçus, et commandement exprès à ses Dames et filles de se parer, lors de leur venue pour qu’elles paraissent déesses et les entretenir sans s’amuser d’ailleurs. Autrement elles étaient bien tancées d’elle, et en avaient la réprimande. »
Note 9 : Thomas Smith avait remplacé Trockmorton comme ambassadeur après sa disgrâce avait envoyé son conseiller Somers en Angleterre pour y chercher les dernières instructions de la reine Elisabeth. Ce dernier arrivera à Troyes le 31 mars, où il avait été précédé par Trockmorton qui lui, était arrivé dans la nuit du 31 mars au 1er avril. Anobli en 1548, il fut déchu de tous ses titres lors du couronnement de Marie Ire, mais revint en faveur sous Élisabeth Ire. Député, il servit en 1562 comme ambassadeur en France, où il devait rester en poste jusqu'en 1566 où il sera remplacé par
Note 10 : Don Françès de Alava était arrivé à la Cour en remplacement de Chantonnay, qui avait par trop déplu. Il avait présenté lors des fêtes de Fontainebleau de mars 1564 ses lettres de créances. Il rédigera en 1571, alors que très malade il s’apprête à quitter la France, à l’intention de celui qui devait lui succéder, de longues instructions, en forme de testament politique, dont plusieurs pages concerneront les évènements liés au ‘Tour de France,’ mais bien sur l’essentiel de sa note, concernera la Cour, les enfants royaux et bien sur la relation avec son maitre le roi d’Espagne
Note 11 : Smith qui avait remplacé Trockmorton comme ambassadeur en France après sa disgrâce, avait envoyé son conseiller Somers en Angleterre pour y chercher les dernières instructions de la reine Elisabeth. Ce dernier arrivera à Troyes le 31 mars, où il avait été précédé par Trockmorton qui lui, arrivera dans la nuit du 31 mars au 1er avril. A la différence de son prédécesseur, il ne s’éloignera jamais du roi, de la reine et de la cour.
Note 12 : Elisabeth sera bonne joueuse, elle fera porter par Henri Carey, lord baron Hunsdon l’ordre de la Jarretière en gage de réconciliation entre les deux couronnes, qui la remettra le 22 juin à Charles IX là son arrivée à Lyon
Note 13 : C’est à Bar-le-Duc que le jeune roi Charles IX déclara à Smith l’ambassadeur d’Angleterre qui continuait de suivre la Cour dans ce ‘Tour de France’, qu’il estimait plus l’amitié de la reine d’Angleterre que l’or et l’argent, et que si les femmes avaient pu être admises dans l’ordre de Saint Michel, il l’aurait fait pour elle
Note 14 : Comme le comte de Mansfeld fera partie de l’histoire de Moret, il a paru intéressant de donner la relation du baptême d’Henri II de Lorraine donnée par Pierre Champion dans son livre ‘Catherine de Médicis présente à Charles IX son royaume’ (1564-1566) Grasset1937: « La cérémonie de Baptême eut lieu le 7 mai. La reine-mère avait le roi son fils à sa droite, le comte de Mansfeld à sa gauche. Et elle donna au petit le nom si cher d’Henri. Don Francès (l’ambassadeur d’Espagne), incliné, passait à Madame Claude de Lorraine, la bague, qui était le présent de sa Majesté Catholique (Philippe II d’Espagne beau frère de Claude ayant épousé Elisabeth de France, sa sœur ainée de 18 mois); La duchesse la reçut avec une joie visible. Alors Catherine tendait à sa fille une ceinture ornée de très grosses émeraudes. Mais le Rhingrave, invité, colonel des allemands, dit à Mansfeld : « Par ma foi, les meilleures de ces émeraudes, je les ai vendues, ce sont celles que j’avais gagnées aux guerres passées dans les églises !.... ». Philippe, comte Rhingrave de Salm et du Rhin,s’était distingué dans l’armée royale lors du siège du Havre (voir l’article précédent de la revue de Moret). Il avait épousé Françoise de Genouillac, veuve de Charles de Crussol. Quoique protestant, il servit toujours dans les armées catholiques.
La reine-mère rayonnait de joie. Elle disait au cardinal de Lorraine qui faisait ici le majordome: «Montrez ce petiot » et c’est de ce jour certainement que les relations solides s’établirent entre Mansfeld et la reine mère. Un peu plus tard Mansfeld commandant les troupes fournies par le roi d’Espagne, participera à la victoire du futur Henri III alors duc d’Anjou, lors de la bataille de Moncontour du 3 octobre 1569.
Mansfeld avait épousé en premières noces Diane de Cossé-Brissac, fille du maréchal de Brissac, qu’il aurait selon Dreux du Radier dans son ’dictionnaire de l’amour’, tué de sa main, l’ayant surprise lors d’un adultère.
Note 15 : Isabelle de Limeuil enfermée avec son enfant au couvent d’Auxonne, puis de Macon, puis de Vienne en Dauphiné, où elle sera enfin libérée, ne retrouvera plus le cœur de Condé, qui n’aura été fidèle qu’à la religion réformée…il était déjà tombé sous le charme de la Maréchale de Saint André qui lui léguera Vallery. Elle ne lui pardonnera jamais. Quand ce dernier fut assassiné en mars 1569 à la fin de la bataille de Jarnac, Isabelle de Limeuil vint contempler le corps qui avait été exposé sur une table au Château de Jarnac et s’exclamera dit-on:
" Enfin !". Elle avait entre temps épousé le financier italien Sardini, qui sera anobli par Charles IX et portera des armoiries parlantes:‘Des sardines d’argent sur fond d’Azur’.Sardini devenu proche de la Reine mère à l’occasion de ce mariage, va intervenir plus tard dans les transactions lors des cessions de l’engagement du comté de Moret.
Note 16 : Le long séjour à Roussillon permettra aux légistes en accord total avec la reine mère de rédiger différents textes, dont des restrictions aux huguenots dans la pratique de leur culte, en s’efforcer d’enrayer leur prosélytisme mais aussi l’ordre sous peine de bannissement aux prêtres mariés de l’église catholique de se séparer de leurs épouses.
Note 17: L’inquiétude de Philippe II, sinon ses craintes tenait au revirement selon lui de la reine sa belle-mère. Pour le roi de la très catholique Espagne, la situation en France s’aggravait: Le Huguenot, l’amiral de Coligny revenu en grande autorité, siégeait à nouveau au conseil royal, le connétable de Montmorency faisait alors fait et cause pour ses neveux les protestants Chatillon, et se montrait plus qu’hostile aux Guise les catholiques. Philippe II chargera même par un courrier son ambassadeur Alava de dire « confidentiellement » à la reine mère les mots suivants : « Vous ne manquerez pas de lui faire peur et de lui répéter que, si elle ne gouverne pas d’autre façon, cela me mécontentera beaucoup, obligé comme je suis, à prendre en main les intérêts et le service du roi mon frère.»
Instruction données par le roi Philippe II au Duc d’Albe
« Il sera besoin pour le bien, défense et augmentation de la religion catholique et apostolique que la vue future ne se fasse sans résoudre et accorder ensemenblement du contenu ès articles suivants :
1°:De faire promesse mutuelle d’avancer, autant qu’il sera en leur puissance, l’honneur de Dieu, soutenir la religion sainte et catholique et pour la défense d’icelle employer leurs biens, forces et moyens, et ceux de leurs sujets ; ne permettre jamais es pays de leur obéissance aucuns ministres, ne exercice de la religion nouvelle, soit en public ou en particulier, et faire faire commandement à tous lesdits ministres sortir hors des provinces e terres desdits princes dedans un mois, sous peine de la vie, sans qu’il soit loisible ni permis à aucuns de les receler, cacher ni supporter, sous les mêmes peines et confiscations de leurs biens ; Faire publier en chacun de leurs dits pays, garder et entretenir le concile général dernièrement fait et célébré à Trente et tenir la main que ces décrets soient reçus et suivis sans aucun contredit ; faire protestation et promesse de ne jamais pourvoir aucuns personnages des états royaux , soit de judicature ou autre quelconque, sans que le pourvu ait préalablement fait profession en la foi, et qu’il ait premièrement été connu être de la susdite vraie religion, et sera mis clause par toutes les lettres desdites provisions, que les pourvus demeureront et continueront en la susdite religion sous peine d’être destitués ; de purger et nettoyer leurs maisons et justices de toute hérésie et religion nouvelle et ne souffrir en icelles ceux qui seront entachés et permettre aux villes de rembourser qui sont de l’opinion de la nouvelle religion les juges et officiers royaux, si tant est que Les dites Majestés ne le puissent faire de leurs deniers, comme il serait nécessaire et requis ; casser tous gouverneurs et autres grands seigneurs des conseils privés des Dites Majestés et tous autres ayant charge, autorité et commandement ès dit royaume, qui trouvèrent être de la nouvelle opinion, ensemble tous les capitaines, maitres de camp qui sont à leur solde, et font néanmoins profession de la religion contraire ; de priver de l’état et honneur de leur ordre et chevalerie tous ceux qui ne veuillent suivre, observer et entretenir les statuts, lois et ordonnances desdits ordres, ni recevoir désormais personnages qui ne soient de la qualité chrétienne et religion requise. »
Archives nationales, collection Simancas, K.1503 n°11
Note 18: L’ambassadeur turc sera bien reçu le 18 juin dans un monastère près de Bayonne par Charles IX, qui en donne la relation dans une lettre qu’il écrit à du Ferrier : L’ambassadeur du sultan Soliman demandait à la Frace l’usage d’un port en méditerranée, au cas où sa flotte ne parviendrait pas à s’emparer de l’ile de Malte… !!! BN fonds français N°10735, p.93 et suivantes
Note 19: On appelait alors Floride toute la côte actuelle des Etats-Unis tant sur l’Atlantique que sur le golfe du Mexique. Dès 1555 Coligny dans la pensée d’ouvrir une sorte de champ d’asile à ses coreligionnaires, avait envoyé dans la baie de Guanabare l’actuel Rio de Janeiro une première expédition commandée par Durand de Villegaignon. Il la fera suivre de deux autres la dernière en 1564, mais les malheureux protestants et leurs femmes qui venaient de s’y établir, furent massacrés sauvagement par les Espagnols
Note de la page 353 du Tome II de la correspondance de Catherine de Médicis par M. de La Ferrière
Commentaires